Les mauvaises odeurs figurent parmi les principales causes de plaintes liées à la qualité de l’air. Et pour cause : une odeur inhabituelle peut révéler la présence de certains polluants, même à des concentrations très faibles.
Notre nez, véritable détecteur chimique, est capable de repérer certaines substances odorantes bien avant que leur présence atteigne un seuil de toxicité. Cette sensibilité remarquable est utilisée pour surveiller les odeurs autour de sites industriels ou de traitement de déchets, souvent signalés par les riverains.
D’où viennent les odeurs ?
Les molécules odorantes sont nombreuses et nous entourent dans notre quotidien. Une odeur est générée par un mélange de composés plus ou moins volatils, plus ou moins persistants. On les rencontre aussi bien dans la nature que dans nos produits domestiques, ou encore dans les effluents industriels.
Un effluent odorant peut contenir plusieurs types de composés, comme :
- Des composés soufrés (hydrogène sulfuré, mercaptans…) à l’odeur d’œuf pourri ;
- Des composés azotés (ammoniac, amines…) qui rappellent le poisson ou le fumier ;
- Des composés oxygénés (alcools, aldéhydes, cétones, acides carboxyliques, esters…) aux odeurs variées ;
- Des hydrocarbures (aromatiques, aliphatiques), qui peuvent dégager des senteurs plus ou moins fortes.
L’odeur de ces composés est une notion très subjective, liée à l’interprétation qu’en fait notre cerveau (en liaison avec notre mémoire et notre vécu) et de notre sensibilité individuelle. Par exemple, le sulfure d’hydrogène donne une impression d’œuf pourri, une odeur piquante et irritante pour l’ammoniac, de poisson en décomposition pour la méthylamine, de vinaigre pour l’acide acétique, une odeur âcre et suffocante pour le formaldéhyde, ou encore d’amande amère pour le benzaldéhyde…
À l’inverse, certaines molécules peuvent avoir des odeurs très agréables. C’est le cas des esters, très utilisés dans l’industrie du parfum. Présents naturellement dans les fruits, ils sont responsables de nombreuses senteurs familières : éthanoate de butyle (odeur de banane), éthanoate de benzyle (odeur de jasmin), propanoate de butyle (odeur de pomme), bBenzoate d’éthyle (odeur de cerise)...
La perception des odeurs
L’odorat est un sens chimique : il détecte des molécules présentes dans l’air grâce à la muqueuse olfactive, située dans le nez, qui envoie des signaux au cerveau via le nerf olfactif. Ce processus complexe permet à l’humain de reconnaître jusqu’à 10 000 odeurs différentes, souvent à des concentrations infimes.
Si le nez humain compte environ 5 millions de cellules sensorielles, le chien en possède près de 200 millions, ce qui en fait un expert en détection ! Pour autant, notre nez reste étonnamment performant : il perçoit parfois des odeurs que même les instruments de mesure les plus sophistiqués ne détectent pas.
Notre nez reste, dans bien des cas, plus efficace que les machines pour détecter les odeurs !
On parle alors d’olfactométrie : cette méthode consiste à analyser les odeurs de manière globale, en combinant l’identification des molécules responsables et leur perception par l’être humain. Elle permet de mieux comprendre les plaintes des riverains et d’évaluer l’impact réel d’une nuisance olfactive.
Odeur = pollution ?
Une odeur n’est pas forcément un danger pour la santé. Mais dès lors qu’elle est perçue comme gênante par la population, elle devient une nuisance, et donc une pollution au sens de la loi.
La Loi sur l’Air et l’Utilisation Rationnelle de l’Énergie (1996) précise qu’est considérée comme pollution atmosphérique : « l’introduction par l’homme, directement ou indirectement, dans l’atmosphère et les espaces clos, de substances ayant des conséquences préjudiciables […] ou provoquant des nuisances olfactives excessives. »
La gêne ressentie dépend de nombreux facteurs :
- La concentration et la nature des composés émis,
- Les conditions météorologiques (vent, humidité, température),
- La fréquence d’exposition,
- La sensibilité des personnes exposées.
Certaines installations comme des industries, des stations d’épuration ou des centres de traitement des déchets peuvent produire des odeurs récurrentes, perçues comme incommodantes. Bien que la concentration en composés soit souvent inférieure aux seuils de toxicité, l’exposition prolongée ou répétée peut impacter la santé : stress, nausées, maux de tête, troubles du sommeil... Elle peut aussi nuire à la qualité de vie : gêne en extérieur, impossibilité d’ouvrir les fenêtres…
Attention aux idées reçues :
- Une odeur désagréable n’est pas forcément toxique.
- Certains polluants dangereux sont… inodores ! C’est le cas du monoxyde de carbone, un gaz très dangereux qui ne dégage aucune odeur.
La « Minute internationale des odeurs » : une expérience collective et sensorielle
Le 10 juin à 10h06, la Minute internationale des odeurs invite chacune et chacun à faire une pause pour respirer… avec le nez ! Organisé par Atmo Normandie, sur une idée de l’écrivain Mathieu Simonet, cet événement poétique et sensoriel redonne aux odeurs toute leur importance.
L’édition 2025 sera l’occasion de sensibiliser à l’anosmie, cette perte de l’odorat encore méconnue mais qui touche plusieurs millions de personnes en France.
En invitant le grand public à se reconnecter à ses sensations olfactives, cette initiative originale nous rappelle que sentir est bien plus qu’un réflexe : c’est une porte d’entrée vers nos souvenirs, nos émotions… et notre environnement !
Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site de nos confrères d’Atmo Normandie
Les bons gestes
Il y a une mauvaise odeur chez moi, j’identifie son origine et agis pour que la gêne cesse. Par exemple :
- J’aère après avoir cuisiné, surtout en cas d’utilisation de poêles ou de fritures
- J’aère ma salle de bains après une douche pour éviter l’humidité persistante et les moisissures
- J’évite de faire sécher mon linge à l’intérieur, pour limiter l’humidité et les odeurs stagnantes
- Je ne fume pas à l’intérieur : la fumée de tabac dégrade fortement la qualité de l’air intérieur
- J’évite l’usage fréquent d’encens ou de bougies parfumées, qui émettent des substances irritantes ou polluantes
- Je ne brûle pas de déchets verts dans mon jardin : c’est interdit et polluant pour l’air ambiant
Bon à savoir : une bonne ventilation régulière est essentielle, même en hiver. Ouvrir les fenêtres 5 à 10 minutes par jour permet de renouveler l’air sans trop refroidir le logement.
Les nuisances olfactives peuvent être considérées comme un trouble de voisinage et, de ce fait, être sanctionnées. Une fois la source des odeurs identifiée :
- Je saisis le syndic de copropriété, en cas de nuisance dans un immeuble
- Je signale le problème à la mairie ou au service communal d’hygiène et de santé
- Je dépose une réclamation à l’encontre du fonctionnement de l’installation classée industrielle ou agricole incriminée
- Je saisis le tribunal compétent (tribunal judiciaire ou de proximité) en cas de gêne persistante ou de non-résolution du litige.
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